J64 — Réinventer son discours sur les réseaux sociaux 🤳🏾
Parce qu'une entité sportive ne peut pas toujours parler que de sport surtout quand l'issue d'une rencontre est aléatoire.
Bonjour à toutes et tous,
Fin mars 2023, dans le temps additionnel, je vous parlais de ces entités sportives qui parlent de sport autrement sur leurs réseaux sociaux en prenant l’exemple d’Aston Martin F1 Team qui, plutôt de couvrir l’action sportive relayée par des dizaines d’autres comptes, avait couvert le GP d’Arabie Saoudite en suivant ses mécaniciens et ingénieurs.
Quelques jours après cette newsletter, le directeur communication d’un club de foot me confiait la difficulté à convaincre l’équipe digitale de poster autre chose que des contenus sportifs. Rien ne faisant plus de vues et d’engagements que des buts et des petits ponts, il était difficile de les décider à couvrir les rencontres autrement, à parler des engagements RSE ou à promouvoir les valeurs du club. C’est là le piège des réseaux sociaux, de se concentrer davantage sur le reach plutôt que ce que ça dit et représente de nous.
Pourtant, puisque la finalité d’une rencontre sportive est aléatoire, toute organisation doit pouvoir imaginer de nouvelles façons de couvrir l’action et pousser des messages plus corporate car une marque ne s’incarne pas uniquement au travers d’un produit mais aussi de ce en quoi elle croit et ce qu’elle défend.
Dans cette édition, explorons comment les entités sportives peuvent s’exprimer et partager autrement sur les réseaux sociaux.
Vous pensez que cette édition peut intéresser une de vos connaissances ? Transférez lui par mail ou partagez cette newsletter sur vos réseaux sociaux.
📣 Parler de sport oui, mais comment ?
Dimanche soir dernier, si vous vouliez suivre la rencontre Lens vs PSG en Ligue 1 Uber Eats sans la regarder à la télévision, vous pouviez suivre les comptes X respectifs de chacune des équipes, jeter un œil aux lives de L'Équipe ou d’Eurosport, checker régulièrement le score sur l’application de la compétition. Sur tous ces médiums, vous retrouviez la même couverture pourtant, en tant qu’ayants droit, les clubs de Lens et du PSG peuvent se permettre de traiter la rencontre sous un angle unique.
Pendant de longues années, les contenus “coulisses” des entités sportives ont tourné autour des athlètes. Ceci afin de créer de la proximité avec eux et nous en sommes arrivés à tout savoir de leur vie, de ce qu’ils mangent le matin au petit-déjeuner à ce qu’ils écoutent au retour de l’entraînement en passant par leur marque de valise préférée. Les athlètes sont devenus des superstars qui n’ont plus aucun secret pour les supporters, dépassant même l’aura de leur club. Face à eux, les structures sportives sont encore remplies de mystères et alors que les joueurs viennent et repartent, la structure, elle, sera toujours là.
Les fédérations, clubs et entités sportives parleront toujours de sport mais elles doivent trouver un ton qui n’est pas celui d’un média mais de celui qui joue le rôle principal en se servant de tous les personnages secondaires à l’histoire, les décors et accessoires auxquels eux seuls ont accès.
💡 Parlez d’une rencontre de football au travers des yeux d’un jardinier, commentez un match de tennis dans la peau d’un ramasseur de balles, confiez la couverture de l’avant match à l’intendant de l’équipe, retranscrivez Paris-Roubaix avec un expert en pneumatique. Proposez un discours que vous maîtrisez et qu’on ne retrouve pas ailleurs.
🎨 Développer sa propre identité
Une fois son ton maîtrisé, il n’en faut pas délaisser les visuels. Faites le test : supprimez les logos du compte d’un club, dissimulez les noms des joueurs et de l’équipe dans les légendes, est-ce que vous seriez en mesure de dire en observant uniquement la charte graphique, quelle entité sportive est représentée ? Je vous donne ma réponse, pas toujours.
Regardons l’exemple ci-dessous. À gauche, deux publications d’équipes qui ont les mêmes couleurs et si nous enlevons tous les éléments constitutifs du club, rien n’indique lequel est Arsenal et lequel est l’AS Monaco. À droite, nous avons à nouveau deux clubs avec la même palette de couleurs, deux clubs dont le design des maillots est composé de lignes pourtant seul un le reflète dans sa composition graphique et permet ainsi de se démarquer.
Tout comme les mots, les couleurs utilisées et les agencements graphiques proposés en ligne sont de plus en plus similaires bien que cela contribue également à se démarquer et à asseoir sa patte. La couleur terre battue est celle de Roland Garros, l’effet zébré représente la Juventus de Turin, n’est pas McLaren sans orange, etc.
✍️ Rester dans un narratif connu
Il n’y a pas de rencontres avant le week-end prochain, ce serait donc la période idéale pour rappeler ses valeurs, ses engagements mais non il y a un dunk qui fera sûrement beaucoup plus de vues que son soutien à telle association ou son engagement contre le racisme.
Quand nous prenons la parole sur des sujets extra-sportifs, il faut accepter que ça ne plaise pas à tout le monde et que nous ne ferons jamais l’unanimité. Alors que dans la grande consommation, de nombreuses marques se font bâcher si elles ne prennent pas d’engagements sociétaux publics, dans le sport c’est moins le cas. Même si l’engagement est important, nous sommes dans une consommation fanatique. La relation au club est nourrie de souvenirs, d’émotions, de sentiments. Un fan est rarement objectif, il est là pour le sportif avant tout. Par contre, pour tout autre consommateur n’ayant pas atteint l’échelle du fan, pour lui l’engagement est important et c’est ce profil qui dénoncera donc les clubs qui parlent continuellement de sport et jamais de RSE.
Pour prendre la parole sur ces thématiques, il ne faut jamais trop s’éloigner de son ton original.
Transformez un nombre (un record, un score final, la minute d’un but) en un chiffre clé social (un numéro vert, le nombre d’années depuis lesquelles vous soutenez une association, un objectif de développement durable…),
Incarnez le propos sans le résumer à une action de communication. Si la vidéo des joueurs et du staff de l'équipe de France pour dire “non au harcèlement scolaire” en novembre dernier a tellement fait parler c’est parce que ce n’était pas incarné. Chacun a récité la phrase d’un discours qu’il avait découvert 30 secondes auparavant. L’engagement est bon mais le format moins. Alors que quand le Norwich FC parle de santé mentale, cela se sent que le sujet et la forme ont été réfléchis pour être impactant.
Saisissez les opportunités qui font sens pour amplifier vos valeurs comme lorsque Reims a ajouté la clause du bonus kilométrique au contrat de Munetsi, le Chelsea FC participe à la Pride de Londres avec son groupe de supporters Chelsea Pride ou lorsque Mercedes lance des initiatives complémentaires à celle de son pilote Hamilton pour plus de diversité en F1.
❤️ L’exemple du Liverpool FC
L’hymne du club de football de Liverpool, You'll Never Walk Alone soit Tu ne marcheras jamais seul en français, a été écrit à la base dans le cadre d’une comédie musicale pour dire à son héroïne que malgré le décès de son compagnon alors qu’elle est enceinte, elle ne sera jamais seule. Cet hymne est donc une déclaration d’amour et de solidarité.
Liverpool, qui entonne ce chant à chaque match, est un très bon exemple de prises de parole réussies sur les réseaux sociaux sur les sujets de l’inclusion et qui sait redonner à sa communauté. Le nombre de vidéos de rencontres entre des joueurs et des supporters au grand cœur est impressionnant : Dáire Gorman, atteint du syndrome de Crommelin, qui rencontre Klopp et Diaz ; célébrer un fan qui agit pour la communauté.
Le club a aussi su embarquer deux de ses partenaires dans ces prises de paroles plus sociétales, Nivea Men et Axa. À leurs côtés, Liverpool remercie les fans qui agissent pour les autres avec la série “Dear Liverpool FC” et notamment ces deux vidéos auprès de soignants (ici et ici) ; véhicule un message d’inclusion et de sensibilisation en mettant en avant les histoires de fans souffrant de certaines maladies comme de démence, de dépression mais aussi des personnes âgées ; sensibilise les supporters au dépistage des cancers du sein et des testicules avec la campagne “In Safe Hands” ; challenge les stéréotypes avec la campagne “Le football c’est pour tout le monde” avec l’équipe féminine.
D’autres entités sportives sont aussi très engagées comme le Red Star autour des sujets d’insertion professionnelle et d’inclusion des jeunes du 93 ou le Paris Basketball sur les sujets de précarité que ce soit pour les étudiants ou auprès du Secours Populaire.
Réinventer son discours sur les réseaux sociaux c’est ne pas laisser les hauts et les bas d’une saison sportive définir sa présence sociale. Il faut investir dans une stratégie de contenus où sportif et engagement sont complémentaires pour incarner une marque au travers de ses passions et désillusions ainsi que ses valeurs et convictions.
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J'aime beaucoup les exemples que vous donnez. Je prône, principalement sur mon profil LinkedIn, la volonté que devrait avoir les marques dans leur stratégie de communication. Trouver un combat, une cause. En l'occurrence sur les médias sociaux.
J'ai une question qui me vient à l'esprit : ces actions, ces messages de certains clubs de sport, sont ils transposables dans le quotidien d'une entreprise, d'une institution ?