J84 — Naviguer et communiquer, le double défi du Vendée Globe 🧭
La 10è édition du tour du monde en solitaire et sans escale a débuté. 40 skippers et autant d'histoires personnelles se sont lancés dans cette folle course que chacun documente pour les fans à terre.
Bonjour à toutes et tous,
Voilà presque 10 jours que le Vendée Globe s’est élancé des Sables d’Olonne et bien que la voile soit loin d’être l’un de mes sports de prédilection, les grandes courses me fascinent. J’ai beaucoup d’admiration pour ces skippers qui vont braver les océans, leur courage mais aussi leur patience. 45 000 kilomètres à parcourir, le plus rapide l’a réalisé en 74 jours et 3 heures. Il faut donc être prêt à fournir un effort long avec un repos plutôt approximatif, une performance qui relève d’un véritable dépassement de soi.
Le Vendée Globe est la plus grande course à la voile autour du monde, en solitaire, sans escale et sans assistance. Comme cette description l’indique, il s’agit donc d’un événement itinérant, sans spectateur en tribunes comme on a l’habitude d’en voir, et sans media man pour capter les meilleures images sur votre bateau. Autant de caractéristiques qui suscitent questions et réponses que je vous partage dans cette édition.
Au programme, 10 minutes de Temps Additionnel pour répondre à :
Comment les skippers développent leur marque personnelle en amont de la course ?
Comment faire vivre une course au large auprès d’une audience restée à terre ?
Comment les sponsors capitalisent sur leur association avec les bateaux ?
Romane — Une question ou une suggestion ? Envoyez moi un mail.
Vous pensez que cette édition peut intéresser une de vos connaissances ? Transférez-lui par mail ou partagez-la sur vos réseaux sociaux. Un clic pour vous, c’est comme un but à la 80ème en finale de Coupe du Monde pour moi.
Les réseaux sociaux, incontournables dans le métier de skipper
Cette année, 40 skippers de 11 nationalités ont pris le départ du Vendée Globe. Certains pour la première fois comme Violette Dorange, benjamine de l’édition, tandis que d’autres prennent leur sixième départ comme Jean Le Cam. Sous leur casquette de skipper, ils revêtent aussi celle de “producteur de contenus” pour communiquer directement avec leur public ou bien représenter leur bateau sur des comptes dédiés.
Les skippers doivent donc mettre en avant leur personnalité à travers les réseaux sociaux pour se démarquer.
Violette Dorange se distingue par sa communication accessible sur YouTube et Instagram, où elle partage son quotidien, ses émotions et les défis rencontrés en mer. Sa manière authentique d'expliquer des termes techniques, notamment à travers des schémas, lui permet de toucher à la fois les passionnés de voile et un public plus large. Au-delà du défi colossal qu’elle relève avec le Vendée Globe, elle se dévoile également comme une jeune femme de 23 ans tout à fait relatable, partageant des moments de détente, de trail, et des sorties entre amis. Signe de sa popularité grandissante, elle a gagné plus de 70 000 abonnés sur Instagram les trois semaines précédant le départ.
Guirec Soudée a un profil atypique. Que ce soit sur ses comptes personnels ou ceux de son bateau, on sent que ses expériences passées ont façonné son âme d’explorateur à l’image de son tour du monde par les pôles avec sa poule Monique. C’est un homme qui aime le défi, qui ne manque pas d’humour et qui même quand il est filmé en pleine avarie semble contenir son stress. Pour le compte de son bateau, il se prête à tous les types de challenge et montre son habileté à se mettre dans la peau d’un acteur.
Boris Herrmann réussit à combiner passion pour la voile et engagement social en utilisant ses comptes pour sensibiliser aux questions environnementales et climatiques. Il bénéficie également de l’apport d’une équipe communication qui alimente site internet, développe des mini-séries et monte des réels en utilisant les musiques du moment sans jamais faire de l’ombre au skipper, premier héros des courses dans lesquelles il s’embarque.
Bien qu’il a dû abandonner après sa rupture partielle des ligaments de la cheville, Maxime Sorel se lançait sur son deuxième Vendée Globe ou devrais-je écrire « Everest des mers ». Après sa première participation, il s’est attaqué à l’Everest sur terre dont il a atteint le sommet le 18 mai 2023. C’est enrichi de ce « Double Everest » conté dans un livre et un documentaire qu’il a repris la route du Vendée Globe. Marin et alpiniste, le trail et la course à pied font aussi partie de ses hobbies. Il a même organisé un run pré-VG avec sa communauté.
Enfin, si la nature solitaire de la course signifie que ces athlètes sont souvent leurs propres réalisateurs, ce sport génère aussi des contenus uniques, tels que des interviews à 27 mètres de haut, des visites de cabines, des vidéos de dauphins ou des préparations d’avitaillement. Ils naviguent seuls, mais avec de grandes équipes derrière eux, qui sont également mises à l’honneur à travers de beaux contenus, comme la série « En solitaire mais pas seul ».
Des millions de fans à engager à terre
Avant même le départ, la relation avec les fans du Vendée Globe se tisse sur la terre ferme. Le village grand public ouvre trois semaines avant le coup d’envoi de la course, coïncidant avec le début des vacances scolaires. Les stands des partenaires, les diverses activités proposées et la présence des skippers offrent un avant-goût du Vendée Globe. C'est l'occasion idéale pour attirer petits et grands, et les préparer à s'immerger dans trois mois de compétition.
Les visiteurs peuvent explorer un Imoca, participer à des séances de dédicaces, savourer des dégustations culinaires, admirer des expositions, visionner des films ou encore profiter de DJ sets au bar VandB Globe, accessible sans billet. Autant d’activités qui permettent de toucher un large public : curieux, passionnés, gourmands, familles, jeunes et amoureux de l’océan.
Un aspect particulièrement intéressant est la création de « ponts » vers d'autres univers dont le Vendée Globe a fortement besoin pour faire croître son audience.
Cinéma et série — Le film « La Vallée des fous », sorti le 13 novembre, établit un lien entre le cinéma et le monde du gaming via Virtual Regatta. Ce film suit un passionné de voile qui vit le Vendée Globe en (presque) conditions réelles, s’isolant dans un bateau dans son jardin. Une série documentaire est aussi prévue pour 2026, et enfin jusqu’au 24 novembre, vous pouvez regarder 29 173 NM, le documentaire qui relate le Vendée Globe 2020 de Thomas Ruyant, en replay sur France TV.
Memorabilia — L'album Panini du Vendée Globe, qui joue sur la dimension de la collection et du souvenir, s'inspire de phénomènes similaires observés dans d'autres événements populaires.
Éducation — Le programme Vendée Globe Junior, ainsi que l’initiative du Vendée Globe virtuel en collaboration avec la FF Voile et Virtual Regatta, renforcent l'engagement envers les jeunes. L'introduction de la première mascotte, Adélie le manchot, témoigne également de la volonté d'inclure les jeunes générations.
Personnalités 2.0 — Plusieurs créateurs ont mis en lumière l'avant Vendée Globe, tels qu'Unseen Samy en collaboration avec l’organisation, Chloé Vancaeyzeele qui a expérimenté le métier de marin, ou encore Deux Nuits Avec, qui a eu l'occasion de rencontrer Yannick Bestaven grâce au soutien du Crédit Agricole.
Merchandising — Je pense que c’est l’accroche à travailler qui mériterait une collaboration avec un artiste qui a un parti pris ou alors une collection rétro un peu dans la continuité de ce que m’inspire ce pins.
Une fois la course lancée, les skippers sont sollicités pour continuer à entretenir le lien tissé avec le public. Ils doivent fournir un ensemble d'images de la course, soit six photographies par semaine et deux minutes de vidéos (plans séquences ou montages) trois fois par semaine. En 2021, plus de 1000 vidéos et 1600 photos ont été envoyées à l'organisation du Vendée Globe.
Les skippers reçoivent des directives sur le type d’images à transmettre : rencontres avec d'autres concurrents, réparations à bord, moments de la vie quotidienne, etc. Ils s'engagent à transmettre ces contenus en priorité au Vendée Globe, qui bénéficie de la primeur de leur utilisation. Une fois le contenu pré-validé par l'organisation, les référents communication de chaque skipper disposent de 60 minutes pour valider ou non la publication des images, à toute heure du jour ou de la nuit, car aucun blackout n’est observé durant la course. Cela permet de nourrir en continu les médias et d'assurer la visibilité du Vendée Globe.
Depuis le début de la course, on a donc vu les selfies fleurirent sur les comptes du Vendée Globe, Violette Dorange se servir de son canal Instagram pour laisser des vocaux mais aussi de Linkedin pour citer ses partenaires, les points carto sont réguliers dans toutes les stories. On a aussi vu Thomas Ruyant gagner le coucher de soleil de la première semaine, Boris Herrmann être consistant avec ses messages vidéos, Antoine Cornic embrasser la mer pour nous et elle lui rend bien avec les dauphins, Fabrice Amedeo tenir son journal de bord et écouter JUL au milieu de l’océan, Sam Goodchild adopter les codes réseaux sociaux (musique, trend et typo) pour se démarquer.
Innovation technologique, visibilité, politique RSE… Le sponsoring en voile reste stratégique
Bien que des sponsors ont annoncé leur fin d’aventure en voile après le Vendée Globe ces dernières semaines, son sponsoring reste désirable grâce au naming et à la visibilité médiatique - tout comme le cyclisme et les Grands Tours. Les marques profitent d’une visibilité accrue et d’un alignement avec des valeurs fortes : dépassement de soi, innovation, performance, résilience ; qui parlent au grand public comme en interne aux collaborateurs. La marque bénéficie d’une histoire humaine et sportive avec des images à couper le souffle mais aussi d’une vitrine forte pour illustrer sa politique RSE ou ses innovations technologiques. En interne, ces projets sont souvent fédérateurs et renforcent la fierté d’appartenance. Enfin, la tenue du village pendant 3 semaines est une excellente manière de fidéliser et convertir de nouveaux clients avec les stands et l’hospitalité.
Sur ce Vendée Globe, il y a trois histoires en particulier que je trouve bien amenée de la part des marques en présence.
Ils portent le nom VULNERABLE — Les deux bateaux de l’écurie TR Racing portent le même nom : VULNERABLE. Un mot utilisé dans la cybersécurité et promu par le partenaire principal du projet, la société Advens. L’objectif : changer de regard sur ce mot souvent péjoratif car dans la vie et en ligne, nous sommes tous vulnérables. Alors si la vulnérabilité devenait plutôt un potentiel à valoriser qu’à dissimuler ? Pour mieux l’appréhender, un parcours pédagogique en dix épisodes propose de découvrir les pouvoirs de la vulnérabilité. Et avant leur départ, l’écurie à partager son teaser de course pour donner le ton.
L’OCCITANE en Provence — Au milieu des bateaux aux couleurs vives, saisissantes et à la communication où performance et agressivité sont induites, je trouve que le bateau de Clarisse Crémer apporte de la douceur et de la sérénité. Cela ne veut pas dire qu’elle n’illustre pas la performance au contraire, mais que l’identité de la marque solaire et délicate au travers de son claim « Le Grand Voyage » a su s’imbriquer dans l’univers de la course au large et s’y distinguer avec un positionnement unique. Une identité qui se décline aussi dans le livret pédagogique “Le Grand Voyage” pour les enfants.
Hellio laisse de la place à Lazare — Quand une association s’affiche dans le sport, c’est en général parce qu’un mécène a entrepris l’opération. Qu’une association fasse donc campagne pour trouver un mécène qui sera moins visible qu’elle est peu commun et pourtant, c’est ce que Lazare a fait en 2022 avec un appel à sponsors dans une vidéo légèrement parodique de la start-up nation. Une vidéo qui a atteint le patron d’Hellio, tout autant touché par la cause que par le sens du projet sportif et humain pour ses collaborateurs. Aujourd’hui Lazare, une association qui propose des colocations solidaires entre jeunes actifs et sans-abri, rend visible les invisibles sur le bateau de Tanguy Le Turquais en étant complètement financée.
Naviguer est donc clé, mais communiquer tout autant. C’est ainsi que le succès du Vendée Globe se construit, à travers les images en mer, les histoires de speakers et le soutien des sponsors. Médias, réseaux sociaux et Virtual Regatta rendent cet Everest des mers plus accessible et captivant pour les passionnés de voile et le grand public. Le 10ème chapitre du Vendée Globe vient juste de débuter, soyez aux aguets des skippers et de l’organisation pour suivre la magie des 60 prochains jours de course !
Si vous avez aimé cette édition, n’hésitez pas à mettre un like ! Ça fait autant plaisir que quand mon bateau n’est pas à la dérive dans Virtual Regatta.
Benjamin Ferré aussi est très fort ! https://www.tf1info.fr/sport/navigation-voile-vendee-globe-2024-combien-vaut-peggy-la-banane-l-oeuvre-d-art-peinture-de-benjamin-ferre-2334909.html