J75 — Les récits de l'Euro 2024 🍻
Cette édition est pour ceux qui, concentrés à regarder les 42 matchs de l’Euro 2024, n'ont pas jeté un œil sur les activations et campagnes des partie-prenantes de la compétition.
Bonjour à toutes et tous,
Si vous ne le saviez pas déjà, l’Euro est dans le top 3 de mes compétitions sportives favorites. Ne me demandez pas par contre de vous donner mon top 3 - je dis que j’ai un top 3 pour justement ne pas choisir un favori !
18 jours et 42 matchs plus tard, les émotions, rebondissements (en particulier si vous êtes un supporter français), buts et contenus n’ont pas manqué. Que ce soit de l’UEFA, des villes hôtes, des équipementiers, des partenaires, des fédérations… Tous sont au rendez-vous pour proposer des campagnes inspirantes, divertissantes et même responsables.
Alors avant de m’envoler pour Berlin et goûter à l’Euro madness, retour sur les récits qui ont émergé en ce début de compétition. Et si vous trouvez qu’il manque des contenus dans cette newsletter, c’est sûrement car j’en garde sous la main pour l’abécédaire de l’Euro 2024 prévu le 16 juillet !
Temps Additionnel : 10 minutes.
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Bien plus qu’un maillot
Un Euro commence à prendre vie quand le tirage au sort a lieu puis lorsque toutes les équipes qualifiées sont connues. Ensuite, le reveal des maillots vient faire grandir l’impatience jusqu’à ce que les listes de joueurs sélectionnés soient partagées par les fédérations. Cette année encore, il y a des maillots pour tous les goûts et cultures, certains même plus politiques que d’autres.
L’Allemagne fait sa révolution rose, joue le style rétro dans ses tenues de jour et rend hommage aux nombre de sélections et clubs d’origine des joueurs sur leur veste. Pour une compétition à la maison, on peut dire qu’on voit qu’eux. La Belgique célèbre l’univers d’Hergé pour fédérer ses supporters autour d’une vedette nationale. L’Italie affiche son hymne national dans le cou. L’Ecosse s’inspire des années 90. Les frontières ukrainiennes sont encore visibles sur le maillot.
Mais les maillots ne se déclinent pas uniquement que pour les équipes à l’image de la collaboration adidas x The Football Gal x Jules Koundé, la capsule MCM ou ni même que dans le football comme le prouve Ferrari.
Les équipes nationales ont aussi donné un air de cérémonie d’ouverture des Jeux à cet Euro en revêtant des tenues officielles allant du costume des Bleus en Smalto, de celui de l’Italie en Armani, du Portugal en Sacoor Brothers au dress code “décontracté chic” des Anglais avec Marks & Spencer et de l’Allemagne en Van Laack.
Faites ressortir l’Écossais qui est en vous
Bien qu’éliminés dès la phase de groupe, les Écossais sont devenus les supporters chouchous de l’Europe, devançant la marée Oranje néerlandaise. Avec ce match d’ouverture et la fête qui a régné plusieurs jours à Munich, on peut les nommer meilleurs amis des allemands - ce n’est pas la maire de Cologne qui nous fera écrire le contraire - au point qu’une pétition a été lancée pour organiser un match Allemagne - Ecosse tous les ans.
Paradant en kilt et avec leur cornemuse, la chanson “No Scotland No Party” scandée par le Tartan Army a résonné dans les rues allemandes. Peu importe qui l’entonnait, tout le monde la reprenait car elle a le don de rassembler et de célébrer l’Ecosse et le football. On estime à 4% de la population écossaise présente en Allemagne lors de la compétition, illustration de la passion et de la fanbase qu’ils sont.
Les sponsors écossais se sont aussi mis à la page à l’image de Tennent's Lager, bière 100% écossaise, qui a lancé une sorte de Germany (Pekin) Express avec des supporters mais qui a aussi demandé aux joueurs de faire preuve d’autodérision - les rendant toujours plus attachants. Pas partenaire mais pas moins engagée, la marque de boisson gazeuse Irn Bru affiche un spot plein d’optimiste pour prévenir l’Europe et l’Allemagne de ce qui les attend car “they can”.
Le match des spécialités culinaires
On écrit souvent que sport et nourriture font bon ménage car ils sont tous les deux extrêmement représentatifs de la culture et de l’identité d’un pays sur la scène internationale alors avant le début de la compétition, Taste Atlas proposait d’étudier les groupes selon leur plat national.
En tribunes ou dans les rues, les comparaisons culinaires se sont rapidement invitées dans le débat footballistique. Au premier match, allemands et écossais se sont réunis autour de leur passion commune : la bière, puis les albanais ont cassé des spaghettis devant des italiens, les autrichiens ont fait de même avec des baguettes devant les français et les suisses ont brandi en tribunes un carton qui disait “La fondue est meilleure que le goulasch” face aux hongrois. Cette “food war” a installé une rivalité amicale dont les marques ont aussi fini par se saisir comme Super Bock.
Le fait culturel comme point de départ
La plus grande peur pour une marque est d’être invisible et inaudible. Quand on sait le nombre d’entre elles qui gravitent autour de l’Euro entre les partenaires de la compétition, les villes hôtes, les fédérations, les diffuseurs, etc…, il y en a forcément plus d’une qui passera à la trappe et ne marquera pas les esprits. Alors pour éviter cela, il faut apporter de la valeur aux consommateurs soit en lui procurant de l’émotion ou en améliorant son expérience. Il faut penser à eux avant sa marque et adopter le bon ton culturel. Plusieurs ont visé juste lors de cet Euro notamment en s’accrochant à un fait culturel ou à une caractéristique forte pour que le consommateur s’y identifie et se sente familier avec la marque.
Le rituel d’avant match — 69% des supporters européens suivent un rituel lorsqu'ils regardent un match de football ce qui a inspiré la campagne “The Ritual Cup” de Coca Cola déclinée en vidéo, marketing d’influence, affichage et collaboration avec highsnobiety.
Utiliser une expression du quotidien — En Angleterre, quand on n’est pas d’accord avec l’arbitre, on dit “You should’ve gone to Specsavers” soit notre équivalent de “Il devrait s’acheter des lunettes”. Specsavers étant une marque, ils se sont payés une campagne avec l’expression traduite en 24 langues afin que tous les supporters de l’Euro puissent l’utiliser.
L’Angleterre, l’ennemi commun — Ce n’est pas que l’Europe n’aime pas l’Angleterre, c’est seulement que les Anglais sont si prévisibles et parfois si confiants qu’il est facile pour les irlandais de Paddy Power d’aller piocher dans les clichés british pour servir une vidéo ludique et pleine d’humour où l’Europe se moque d’eux.
Renverser sa bière — Qui n’a pas, en fêtant un but, déjà été bousculé et renversé un peu de bière à côté ? Personne. C’est bien pour ça qu’Heineken a lancé Heine-care, le premier régime d'assurance pour la bière. Et le mieux dans tout ça, c’est qu’ils ont poussé le concept jusqu’à créer un poncho.
L’espace urbain pris d’assaut
Si les trains ne sont pas à l’heure, ça permet aux voyageurs de regarder plus longtemps les publicités autour d’eux comme l’ambush de Wolt avec son slogan malin “Food bowl’s coming home”. Dans la série des jeux de mots, on a aussi vu l’UEFA reprendre un célèbre nom pour son Eurolingo. Tout ça pour dire que dans les villes hôtes, tout espace est préempté pour parler de la compétition à l’image de l’écran installé sur le fleuve à Frankfurt ou l’habillage de conteneurs à Hamburg en drapeaux.
Les marques aussi s’affichent en grand dans l’espace urbain avec Coca-Cola dans les fanzones qui a proposé un spectacle de drones à Munich, sponsorisé la grande roue de Leipzig et revêtu de rouge les marches de Düsseldorf. En dehors du territoire, la marque sponsorise la fanzone de Zagreb et a ouvert son Food Fest à Paris pour tous les grands événements de l’été.
On note aussi l’appropriation d’espaces par adidas qui a transformé un ferry à Amsterdam en “Boat of football”, installé une “Home of Football” place de la République à Berlin et déployé un maillot des Azzuri plus grand que nature Place d’Espagne à Rome la veille d’Espagne - Italie. Pour reprendre leurs mots, adidas fait dans l’OOH spectaculaire avec des installations XXL à l’image du Manuel Neuer géant affiché dans le métro à Munich, la sculpture des Molecule Men qui portent les maillots allemands, Tony Kroos à l’Olympiapark, etc…
Enfin, c’est en affichant les têtes de ses joueurs dans l’espace urbain que la Belgique a fait l’annonce des retenus pour la compétition.
Put fans (and not fans) first
Le football est l'un des sports qui génère le plus d’émotions, c'est pourquoi le fait d'arriver à toucher les consommateurs pendant cette compétition aide à créer un lien avec la marque qui va au-delà de la consommation, il est lié à un souvenir et généralement à une expérience positive. Alors quand ce n’est pas via un fait culturel qu’on essaye de les toucher, cela peut aussi être en leur parlant directement, en les mettant en scène. Il y un regain de partage autour des histoires de fans, autour du 12ème homme avec qui on a de commun la passion, l’ambition et l’amour du maillot.
L’Ukraine a rendu hommage à ses supporters car si leur équipe est sur le terrain c’est parce que 1 million de leurs supporters sont sur le champ de bataille.
KFC recrute des équipiers qui n’aiment pas le football et en ce sens, même en étant partenaire de l’équipe de France de football, souligne qu’il est ouvert à tous, fans ou non.
Betclic souhaite la bienvenue à tous les parieurs avec une campagne pour toucher les fans de football mais aussi les "mass-eventers", ceux qui s’intéressent qu'aux grandes compétitions.
La fédération anglaise collabore avec Goalclick pour partager les profils et raconter les histoires diverses de fans anglais, et très souvent comment cela leur a permis de sentir appartenir à une communauté.
Bitburger nous montre les pubs, les places de marché, les chambres à coucher les mariages… Autant de lieux où se trouvent les fans et les passionnés de football et où se mélangent vidéo et clichés argentiques.
Au service de la communication responsable
Un événement aussi populaire et visible qu’un Euro de football est une formidable plateforme pour sensibiliser à des sujets sociétaux et pousser des messages engagés. L’UEFA l’a bien compris en amplifiant sa campagne “Get Trained, Save Lives” avec des ateliers en fanzone pour les supporters, la formation des volontaires en amont de l’événement mais aussi celles des équipes durant le tournoi. Même combat pour la British Heart Foundation qui a installé une campagne OOH sur les murs de 12 villes en hommage à 12 jeunes de moins de 35 ans victimes d’un arrêt cardiaque.
Dans les autres causes, la carte prévention envers les paris sportifs a été logiquement préemptée par l’Autorité Nationale des Jeux qui s’attaque aux encarts des lignes légales sur les publicités des organismes de paris bien petites et finalement peu préventives. Il y a aussi la carte de la sécurité routière avec le retour de Yoann Riou qui commente les plus belles actions de proches retenant des personnes qui ont trop bu. Enfin, bien que souvent en retard, la Deutsche Bahn utilise le “You’ll never walk alone” pour dire aux fans que s’ils font le choix d’un transport écologique, ils empruntent collectivement la voie d’un avenir neutre pour le climat.
Les questions de la fin
Pour finir ce très long (mais non moins complet) Temps Additionnel, je vous laisse avec trois questions qui façonneront à mon sens les récits futurs autour de l’Euro et des grandes compétitions sportives :
Face à la prédominance de sponsors non-continentaux, ici 5 sponsors asiatiques, dans une compétition européenne, comment les accompagner et faire évoluer leur narratif produit vers un message et des campagnes plus adaptés à nos usages et notre culture ?
Alors que de plus en plus de fédérations font tout pour encadrer l’expérience de leurs supporters durant le tournoi, pour notamment exposer leurs sponsors, est-il toujours intéressant d’être sponsor d’une compétition plutôt que d’une équipe ?
Faut-il être une nation de sport pour accueillir un grand événement ou accueillir un grand événement peut nous faire devenir une nation de sport ?
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Bravo Romane, en tant que fan de foot et de comm, j’ai adoré ce temps additionnel! Et pour être allé sur place voici deux semaines, je confirme que la Tartan Army à Cologne, c’était quelque chose!